Deux albums de soldats montrant Vingré - L'hécatombe des premiers mois - Le contexte historique 14-18 - Les tranchées du plateau soissonnais - Les abris en retrait des lignes -

 

dDeux albums de soldats montrant Vingré et le plateau de Nouvron en 1915 et 1916

L'album de l'artilleur Cognet (16e R.I.) montre le plateau de Nouvron-Vingré en 1916

Légendée «Au Nord-Ouest du plateau de Nouvron. Dans le fond, les lignes boches qui tiennent la crête et les pentes. Là sont les fameuses carrières de pierre souterraines de l’Aisne où ils se sont accrochés après la bataille de la Marne. Ces carrières constituent des abris ... l’artillerie.»
"Petit poste plateau de Nouvron. Mai 1916"
"Centre B, plateau de Nouvron"
"Le plateau de Nouvron"
"Le plateau de Nouvron. Bombardement des 1ères lignes allemandes"
"Bombardement des lignes allemandes avec des crapouillots.vue prise de nos premières lignes"
"Lavoir à 500m des premières lignes, mai 1916"
"Fin mars 1916. Poste de guetteur"
"Les Allemands ont fait exploser une mine près de l'emplacement où le Gal Maunoury a été blessé"
"1916. En 1ère ligne"
"Un 240 français au tir trop court a détruit la1ère ligne"
"Dans un trou de 240"
"Le 240 maladroit au repos"
"1ère ligne, Nouvron"
"1ère ligne. Un obus a déterré un mort"
"La corvée de soupe dans un boyau"
"Entrée d'une sape"
"Un klaxon à côté du guetteur pour donner l'alerte gaz"
"Crapouillots en batterie,avril 1916"
"Ravitaillement"
"Plateau de Nouvron, mai, juin, juillet 1916"
"1916. En 2è ligne. Ravin près Nouvron. 3chevrons sur l'épaule = 2 ans de campagne (14-16)"
L' album du soldat Brincourt (8eBCP > 48e BCP) montre Vingré et le plateau de Nouvron-Vingré
"1915. Plateau de Nouvron. 1916. Autel taillé dans une creute" [il est à noter la présence du mur de prière, aujourd'hui disparu]
"Au créneau.1915. Nouvron. 1916"
"Plateau de Nouvron. 1915"
"Plateau de Nouvron. 1915. Coin de tranchées"
"Avion boche à 20m en avant de la première ligne"
"Plateau de Nouvron. 1915. PC du Commandant."
Pages complètes

Lieu de conservation : Archives départementales de la Loire (version numérique) [ici ont été replacées 37 photographies issues des pages 20 à 40 de l'album]

http://www.archinoe.net/ark:/51302/ed42ae9a40f647266255c2c1e33a6500

 

L' album du soldat Brincourt (8eBCP > 48e BCP) montre Vingré et le plateau de Nouvron-Vingré

NB: ces 6 premiers clichés sont accessibles en qualité supérieure ICI (Fichier PDF) grâce à l'aimable accord avec les Archives de la Somme.

L'hécatombe des premiers mois de guerre 1914 sur le plateau de Confrécourt

Vous trouverez les extraits de ce que notaient les Groupes de Brancardiers Divisionnaires lorsqu’ils accédaient au champ de bataille pour relever les cadavres & vous trouverez quelques mentions des fosses communes, notamment le relevé de celle découverte au printemps 1999 à proximité des ruines de la ferme de Confrécourt –et donc de la stèle commémorative du 20 septembre 2014.

Voici le relevé de la fosse commune découverte au printemps 1999, à proximité des ruines de la ferme de Confrécourt, où seuls 2 corps parmi les onze avaient conservé leur plaque et ont ainsi pu être identifiés: Denis BOITIER du 216e RI et Charles QUINSON du 64e BCP.

 

Le contexte historique 14-18

La guerre de position octobre 1914 - mars 1917

C’est dans notre région que sont creusées les premières tranchées et que, de « mouvement », la guerre devient de « position ». Les forces s’équilibrent, les troupes cherchent à se retrancher, puis à se fortifier. C’est la guerre de tranchées dont notre sol conserve de très nombreux vestiges (réseaux, boyaux, cagnas, etc.…..).

De septembre 1914 à janvier 1915, les Français refusent la stabilisation du front et les attaques sont incessantes, meurtrières, sans préparation d’artillerie, sans résultat, « on les grignote » dira Joffre !

« Le 3 octobre 1914,

 Avant le jour, ce brouillard léger qui traînait sur le plateau se dissipa, et aux premières clartés indécises on commença à distinguer le terrain autour de soi, le terrain était fort sale, tout jonché de cadavres dont certains gisaient sur le bord ou sur le glacis même des tranchées, des membres sortant de la terre remuée, c’étaient exclusivement des Allemands. Il y avait en outre toutes sortes de débris d’armes, de vêtement, de linge, des boites de conserve vides ; on fit quelques trous où l’on jeta ces détritus. On creusa aussi des fosses où l’on transporta hâtivement les cadavres, qui étendus là les uns depuis le 20 septembre, les autres depuis le 13, c'est-à-dire depuis deux ou trois semaines, étaient dans un état d’horrible décomposition. Les soldats ne pouvaient se décider à les toucher ; ils les attachaient avec des cordes ou des courroies de sac, et les traînaient sur le sol jusqu’à la fosse, dans la pénombre du matin. On ramassait leurs fusils, leurs cartouches ; on alla également chercher les cartouches des morts français qui se trouvaient en arrière du côté de la ferme de Confrécourt ; on prit sur eux des vêtements, capotes et manteaux supplémentaires, dont le besoin se faisait sentir pendant les nuits. On se livra à ces diverses occupations jusqu’à ce que le jour grandit : mais alors des balles sifflèrent, apprenant que l’heure était passée. »

Extrait de « Le Passage de l’Aisne » d’Emile Clermont.

« Le 30 janvier 1915,

Nous trouvons des tranchées profondes de trois mètres parfois pleines d’eau et de boue : quelques-uns sont restés enlisés en montant, il y en a même un qu’on a été obligé de retirer avec des cordes : un autre a perdu un soulier ; c’est des accidents qui arrivent tous les jours et ceux que nous remplaçons ne s’en étonnent pas du tout. Tout le long du chemin surtout en montant depuis le Port on trouve des tombes disséminées un peu partout, elles datent des combats qui se sont livrés du 16 au 20 septembre, lorsque nos troupes se sont emparées du plateau. Là, combattirent le 104e puis le 305e et le 321e. Sur le plateau on trouve encore des lignes entières de tirailleurs allemands qui sont là depuis cette époque et qu’on n’a pu enterrer. Il y a aussi quelques-uns des nôtres qui sont dans ce cas ; il y a même dans un endroit du boyau de communication, deux bottes d’un allemand qui dépassent et qui nous servent de point de repère quand nous passons par là. Entre les lignes il n’y a pas de cadavres, vu le peu de distance des lignes, et quand il tombe, ils sont ramassés dans la nuit »

D’après Léon Vuillermoz, Journal d’un poilu franc-comtois, le Balcon 2001, p.37

« Lettre du 13 décembre,

…nous sommes donc restés quatre jours dans les tranchées de première ligne. C’est le séjour le plus dur que nos hommes aient eu a subir depuis le début de la guerre de tranchées. La pluie n’a guère cessé. Le tableau qu’offraient nos hommes au sortir des tranchées n’est guère imaginable. Sous l’action des pluies, le limon du plateau délayé coulait le long des parois ; les éboulements étaient fréquents, de même que les effondrements de sapes et d’abris.

La veille au soir, la pluie n’étant pas tombée de la journée, nous avions asséché autant que possible et rétabli les passages ; le matin de notre départ, après la pluie et la neige de toute la nuit, les boyaux étaient remplis de boue et d’eau, les hommes enfonçant jusqu’à mi-corps. C’est un miracle que nous n’ayons perdu personne. Car, en outre, les jours précédents ; le secteur était très agité, et nous avons reçu force crapouillots et obus lisses »

D’après Roger Sargos : Témoignage 1914-1918 d’un officier forestier, Tome I ; 1914-1916 (œuvre posthume) Bordeaux, 1967, p270/1
 

La retraite allemande

mars 1917


1917, les généraux Hindenburg et Ludendorff qui assurent la direction suprême de l’armée allemande décident de porter leur effort sur le front de l’Est, en Roumanie, en Russie ainsi qu’en Italie. Sur le front de l’Ouest, ils choisissent une bataille défensive, avec comme priorité d’économiser les troupes.

Le 16 mars 1917, le silence règne sur le secteur de Nouvron. Une reconnaissance du 60e B.C.P. découvre les tranchées allemandes vides. On avance et le 20 mars, les troupes atteignent Coucy-le-château où le donjon vient de sauter.

Noyon et Ham sont libérés, les Français crient victoire.

Ce repli raccourcissait le front de 70 Km d’où une économie de troupes. Cette retraite, préparée depuis l’hiver, voit les Allemands s’installer solidement sur les positions Wotan et Siegfried (qui allaient sensiblement en ligne droite de Lens à Laffaux.

De la 2e bataille de l’Aisne à la victoire

1918

L’année 1918 est un tournant. Après leur victoire sur le front de l’Est, les Allemands ne combattent plus que sur un seul front et souhaitent ainsi profiter de leur nouvel avantage pour remporter la victoire finale. Ils lancent en début d’année de grandes offensives, espérant ainsi devancer l’arrivée des troupes américaines (qui viennent d’entrer dans le conflit et qui ne seront opérationnelles qu’en été 1918).

« Le voici donc venu ce jour qui va changer les destinées de la France et du monde ! Je sors de la grotte de Confrécourt où j’ai passé la nuit. L’endroit où nous sommes forme un vaste belvédère où l’on domine toute la région…

La canonnade éclate avec furie sur tout le front. Le tonnerre est déchaîné. Tout l’horizon est embrasé. Dans la fumée des éclatements montent des fusées à trois feux à un feu….

Et le fracas de la canonnade et de la fusillade grandit toujours…

Et voici que de tous les côtés le Boche est enfoncé. Il recule, cédant une étendue de terrain considérable, abandonnant un important matériel et des milliers de prisonniers. A trois heures de l’après-midi, on compte déjà plus de 16000 prisonniers. De notre côté, nous avons repris Fontenoy que nous avions perdu le 30 mai précédent, mais en quel état retrouverons-nous le village et son château ! Tout a été rasé par le tir destructeur de l’artillerie »


Emile Carlier, Mort ? Pas encore ! Mes souvenirs 1914-1918 par un ancien soldat du 127e R.I.,  Archaeologia Duacensis n°7, Société Archéologique de Douai - Claude Carlier, Douai, 1993.

 

Les tranchées du plateau soissonnais

Les tranchées sillonnaient le plateau face de la ferme de Confrécourt.

Voici des clichés pris sur Vingré.

Français, Allemands, tous s'enterrent comme des taupes sur les plateaux du Soissonnais. Tranchées de 2,5 m de profondeur, cagnas de 8 à 9 m et entre les 2 lignes, un réseau de barbelés que chaque adversaire cherche à détruire. Les Allemands en territoire conquis, s'installent avec eau courante, électricité et cela en première ligne au Sud de Morsain. Pour les Français, les ordres sont de reconquérir le Nord de la France et il est donc inutile de s'installer "luxueusement"...

Photographie de 1916 de l'album personnel du S/Lt Pierre Eugène Cognet du 16° Régiment d'Artillerie,légendée
«Au Nord-Ouest du plateau de Nouvron. Dans le fond, les lignes boches qui tiennent la crête et les pentes. Là sont les fameuses carrières de pierre souterraines de l’Aisne où ils se sont accrochés après la bataille de la Marne. Ces carrières constituent des abris  ... l’artillerie.»
" (archives de la Loire )

 


1er Couplet

 

Refrain

Du côté d'Vic sur Aisne,

Dans les tranchées d'Vingré

Les Français, les Teutons

On vient de s'installer;

Au travers de la plaine

Avec un peu de tabac dans les poches

Se flanquent des coups d'canon

 

On s'fout pas mal d'être

Pendant le jour

Aussi près de Boches;

Chacun son tour

S'ils envoient une marmite,

Depuis les tranchées on s'fu

 

sille,

On leur répond bien vite;

Oui, mais le soir

Le 75 se met à cracher

Quand il fait noir,

Sur les tranchées d'Vingré !

Chacun voudrait dormir tranquille

 

Chanson du 170 R.I dans les Tranchées
(sur l'air de "Sous les ponts de Paris")

"3 jours à Vingré, dans des maisons démolies où sont installées les popotes, 3 jours en ligne sur le plateau, à la côte 150, et ainsi de suite. Les hommes de garde sont massés par moitié aux créneaux et dans les abris. La bataille se limite à quelques cartons sur les ranchées d'en face et quelques échanges de crapouillots contre minenwerfer. Nous faisions bon ménage avec les Fritz. Nous correspondions à la voix, ils nous envoyaient des journaux allemands dans des bouteilles, nous leur renvoyions des journaux français..."

L. Cattois du 42 R.I

 

 

"La boue, la voici, la vraie, la seule gadoue! Partout nous en avons jusqu'aux genoux. La guerre n'est pas le seul ennemi du poilu. Tous les récits de la boue, véritable problème dans des tranchées creusées dans le limon des plateaux, et cela dans un labyrinthe de boyaux. Notre consolation, c'est de penser que si les Boches s'aventuraient là-dedans en nous attaquant, il n'en reviendrait pas un seul à Berlin. Les ordres nous sont parvenus d'installer des liaisons par coureur dans les boyaux. Nous répondons par une fin de non recevoir; vu que nos coureurs ne savent pas nager."

 

 

 Lieutemant Etévé du 417 R.I.

 

Plus loin, le lieutenant du 417 R.I précise:

"Ce matin, j'ai eu la frousse d'avoir des pieds gelés dans ma section. Il y avait sur la gadoue une couche de glace qu'on brisait en avançant.... La compagnie d'à-côté a perdu un homme enlisé dans un boyau."

 

"Les hommes sont très fatigués, couverts de boue et leurs effets ont pris la teinte des champs de betteraves. Ah! ces betteraves! Les aura-t-on assez vues par la tête et par les racines! Celles qui sont montées en tige reçoivent des coups de fusils nombreux pendant la nuit; balancées par le vent, elles semblent marcher... Hallucinations!"

Georges Thivel, Lieutenant au 298 R.I.

 

De Septembre 1914 à Janvier 1915, les Français refusent la stabilisation du front et les attaques seront incessantes, meurtrières, sans préparation d'artillerie, sans résultat, "On les grignote" dira Joffre. Le  12 Novembre 1914, les Français attaquent sur Morsain, sans troupe de réserve ni préparation d'artillerie suffisante. C'est un échec. Les pertes sont considérables et cela malgré des actes héroïques:

"Au moment de l'assaut, un prêtre, le sergent Humbert, se dresse dans la tranchée et avertit ses hommes qu'il va leur donner l'absolution de leurs pêchés. Après avoir prononcé la formule sacramentelle, il s'élance en disant: Et maintenant mes amis, allons-y gaiement. Il tombe peu après atteint d'une balle"

Livre d'or du 60 R.I.

 

"Tout à coup, un guetteur d'un poste d'écoute signale un mouvement insolite; presque au même instant, les Boches sortent de leur ligne. Notre feu est déclenché, la voix du 75 se mêle au concert. Tous nos hommes délaissent les créneaux pour tirer librement par dessus le parapet. La ruée de l'ennemi se produit surtout du côté du réseau qui a été détérioré les jours précédents. Les premiers rangs ennemis sont fauchés avant de parvenir au réseau. Les rangs suivants hésitent. On voit les Boches tourbillonner sous les balles. Plusieurs atteignent nos fils de fer et s'y cramponnent pour les arracher, les cisailler. Empêtrés dans les barbelés, ils ne peuvent plus ni avancer ni reculer. Blessés, ils y restent, poussant des cris d'épouvante et de douleur"

Sergent Lefèvre

 

Il est inutile de rappeler qu'en 4 mois de guerre (Août à Novembre 1914) les Français ont 450 000 hommes tués soit un tiers des pertes totales de la guerre.

"Le soir, je fais une patrouille sur la route de Nouvron et je vais jusqu'au calvaire au delà de nos tranchées. Quelle tristesse que ce calvaire brisé par les obus, les quelques arbres hachés par la mitraille, des morts partout. Au pied du socle, comme l'embrassant, trois chasseurs morts sont appuyés ! Ce sont nos libérateurs du 20 Septembre qui ont péri en venant à notre secours.

Ce calvaire, ces morts, avec le soleil du couchant dans le fond, formaient un tableau terrible de guerre. Ne vivons-nous pas ces derniers jours de Septembre au milieu d'un véritable charnier."

Commandant G. Thivel - 298 R.I

 

Calvaire de la Croix brisée près de la Ferme de Confrécourt
 

Un charnier sera creusé devant la ferme de Confrécourt pour ensevelir plus de 500 soldats français et allemands. Puis 2 cimetières accueilleront au pied de la ferme les morts du plateau. Pourtant que de risque pour rechercher un corps.

 

REACTION :

par Ranty le 12/11/2013 @ 16:03
Bonjour
Dans le cadre du centenaire de la Grande guerre, je fais une recherche concernant les soldats de mon village, Villiers sur tholon dans l'Yonne.
Pour l'un d'entre eux Renon Maurice, sa tombe porte la mention
décédé à Cuffy (Cuffies) le 29/10/1914.
Pouvez-vous me fournir des renseignements sur la guerre de tranchées plus précisement à Cuffies et quelles troupes y ont été engagées, à cette date.
Merci d'avance

Les abris en retrait des lignes

Les soldats font bon usage des flancs de plateau et aménagent les abris et leurs abords.

Voici des clichés pris à Vingré.

Le même blockhaus français dans son état en décembre 2016

La carrière Buchet reliée au plateau par cet escalier aujourd'hui disparu

Escalier que pointe Jean-Luc Pamart le10 novembre 2016 lors de la préparation du concert du violoncelle poilu.

 

 

 

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